Sortir de l'ombre

La peau est encore fine, tendre, fragile. Les yeux, eux sont farouches, méfiants comme des animaux sauvages. Les mots sont rares, pudiques et maladroits parfois. Combien de combats chaque jour entre les rêves, combien de poignards rouillés lacèrent chaque matin les bourgeons délicats de l’enfance oubliée ?
Combien de chemins sombres faut-il emprunter, combien de falaises insurmontables à franchir pour apercevoir au loin la lueur vibrante de la confiance ?

Ils ont arpenté le chemin tortueux et le questionnement intime. Ils se sont défendus, puis ouverts, relâchés. Comme une fleur fragile qui s’ouvre enfin, sous les premiers rayons du matin.
Photographier la désistance, se livrer, s’affronter aussi frontalement, vous sauriez le faire vous ? Pas sûr.

Ils ont pourtant pris le taureau par les cornes et ce concept, si abstrait, si loin d’eux, ils l’ont torturés, manipulés, étirés jusqu’à se l’accaparer. Ils en ont retenu, je crois, une route à arpenter, une espérance, planquée tout au bout d’un escalier sinueux. Loin d’un principe figé et impersonnel, ils ont essayé ici de raconter une vision intime et sans filtre de ce cheminement, de cette bascule. Ce souffle auquel on se retient pour ne pas tomber lentement sur une pente glissante. La désistance, ça commence peut-être par un léger affleurement rocheux sur une dalle lisse et verticale. Par une faille creusée lentement dans la roche, dans laquelle les doigts, les ongles se glissent et s’accrochent au prix d’un effort surhumain. C’est ralentir la chute, lever la tête, apercevoir une autre voie. Prendre du recul et du courage. Tellement de courage.
Dans ce mot, désistance, il y a une sorte d’abandon, de laisser-faire. On se désiste. Alors qu’ici, c’est d’un combat qu’ils nous parlent, d’un affrontement, violent et jamais complètement gagné. Pas de happy end, il y a toujours un épisode à suivre, dans lequel tout peut-être remis en question. Mais cette fragilité, cette précarité dont ils nous parlent, elle est synonyme de vérité, d’authenticité et des doutes qu’ils ont et qu’ils assument. Nous avons tous bien des leçons à en tirer.


Projet réalisé avec les jeunes de la Mission Locale des Hautes Alpes et la maison des adolescents 05.